Vous êtes-vous déjà senti coupable parce que votre salon ne ressemble pas à la couverture d’un magazine ? Parce qu’il y a toujours un coussin de travers, une pile de livres qui déborde ou une plante qui perd ses feuilles ? Et si, au contraire, c’était justement là que résidait le charme ?
Depuis quelques années, une petite révolution silencieuse gronde dans le monde de la décoration : celle du “sans style”. Un mouvement qui n’en est pas vraiment un, une philosophie qui invite à cesser de courir après la perfection et à embrasser ce qui est déjà là. Parce que la vraie vie ne ressemble jamais à une page de catalogue… et c’est tant mieux.
Le “sans style” : la plus belle des rebellions déco
Le concept a été popularisé par la styliste anglaise Emily Henson avec son livre Life Unstyled. Ironie du sort : une professionnelle de la mise en scène qui décide de photographier des intérieurs… non mis en scène. Des maisons où les livres s’entassent, où les murs portent les traces du temps, où les objets racontent une histoire plutôt qu’un trend Pinterest.
Ce qui frappe, c’est que ces intérieurs ne sont pas moches. Loin de là. Ils sont vivants. Ils respirent. On a envie d’y entrer, de s’y poser, de toucher les textures usées, de feuilleter les vieux magazines qui traînent. Et c’est là toute la magie : le “sans style” n’est pas l’absence de style. C’est un style en soi. Peut-être même le plus difficile à atteindre.
Pourquoi les intérieurs trop parfaits nous épuisent
Instagram, Pinterest, les magazines… partout la même image : des pièces immaculées, des coussins parfaitement rebondis, des plantes vertes en pleine santé, pas un fil électrique qui dépasse. On appelle ça le “styling”. Et c’est un métier. Un vrai.
La styliste arrive, déplace les meubles, retire la moitié des affaires, lisse le plaid, coupe la feuille jaunie de la monstera, efface la prise électrique sur Photoshop. Résultat : une photo sublime… et un mensonge doux. Parce que dans la vraie vie, juste hors champ, il y a probablement le panier de linge sale, les jouets des enfants et le chat qui dort sur le canapé.
Cette perfection nous complexe. On se dit qu’on n’y arrivera jamais. Qu’il faut tout le temps ranger, acheter le bon vase, la bonne lampe, le bon tapis. Et on finit par ne plus oser vivre chez soi de peur de “casser” le décor.
« Une pièce stylée est bien meilleure à regarder. Peu importe que juste en dehors du cadre, règne généralement le chaos. »Emily Henson
Les 6 raisons puissantes d’adopter la vie sans style
- Être enfin soi-même – Votre maison reflète vos passions, vos voyages, vos héritages. Pas besoin de cacher la collection de vinyles ou les dessins d’enfants.
- Les défauts deviennent des signatures – Un mur écaillé ? Une porte qui grince ? C’est votre histoire. C’est unique.
- La créativité plutôt que la consommation – On chine, on retape, on détourne. On arrête d’acheter juste parce que c’est tendance.
- Le temps fait le travail – La patine, l’usure, les traces d’usage : c’est ce que l’argent ne peut pas acheter.
- Le changement est accepté – Un intérieur évolue avec vous. Pas besoin de tout refaire tous les 3 ans.
- On respire – Fini la pression de la perfection. On vit, tout simplement.
Attention : le piège du “sans style” qui est encore… du style
Petit piège à éviter : croire que le “sans style” signifie entasser n’importe quoi n’importe comment. Non. Le vrai sans style demande paradoxalement une certaine sensibilité esthétique. Les intérieurs d’Emily Henson sont bohèmes, oui. Mais ils sont aussi harmonieux. Les couleurs parlent entre elles. Les textures se répondent. Il y a une cohérence dans le chaos.
Le “sans style” des magazines reste souvent très… stylé. Chaises vintage soigneusement dépareillées, bibliothèque qui déborde mais avec de beaux livres, tapis berbère usé mais pas trop. C’est le syndrome du “beautiful mess”. Un désordre calculé.
Le vrai défi ? Accepter un désordre qui n’est pas forcément photogénique. Accepter que votre salon ressemble parfois à celui de votre grand-mère : napperon au crochet, cadre doré un peu kitsch, meubles des années 70 qui n’ont jamais été choisis pour leur style. Et trouver ça beau quand même.
Comment cultiver un intérieur vivant (même si vous aimez le minimalisme)
Vous aimez le blanc, le bois clair, les lignes épurées ? Rien ne vous empêche d’adopter la philosophie “sans style”. Un intérieur scandinave peut être vivant s’il porte vos traces : un plaid froissé parce qu’on y fait la sieste, une pile de livres de chevet, une tasse de thé oubliée.
L’important n’est pas le style de départ, mais l’usage. Un intérieur devient authentique quand on y vit vraiment. Quand on n’a plus peur de poser ses clés sur la console design. Quand on laisse les enfants dessiner sur le mur (oui, même celui peint en Farrow & Ball).
Mes astuces concrètes pour une déco plus vraie
- Laissez des traces visibles – Un carnet ouvert, un pull jeté sur le fauteuil, des chaussures dans l’entrée.
- Exposez vos collections imparfaites – Les coquillages ramassés en vacances, les cartes postales jamais envoyées, les vieux appareils photo.
- Mélangez les époques sans complexes – La lampe de grand-mère avec le canapé Ikea, pourquoi pas ?
- Acceptez la patine – Un canapé qui s’affaisse, un parquet rayé : c’est la vie.
- Photographie moins, vivez plus – L’appareil photo a tendance à nous faire ranger. Posez-le.
Et surtout : arrêtez de comparer. Votre maison n’a pas besoin d’être “Instagrammable”. Elle a besoin d’être aimée. Par vous. Par ceux qui y entrent. Le reste n’a aucune importance.
Alors, prêt à lâcher prise ? À laisser votre intérieur respirer, vieillir, vivre ? À embrasser ses imperfections comme on embrasse celles des gens qu’on aime ?
Parce qu’au fond, la plus belle décoration du monde, c’est celle qui raconte qui vous êtes. Sans filtre. Sans retouches. Juste vraie.